Aller au contenu

Page:Say - Œuvres diverses.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vent désirer de conserver leurs fonctions, et pour les conserver, de les remplir dignement.

La difficulté est de les bien choisir. L’opinion publique est-elle en général assez éclairée pour les désigner ? Les uns croient que le public est éclairé par ses propres intérêts ; et de plus, on observe que les intérêts des uns balancent les intérêts des autres : c’est cette raison qui fait que, dans les parterres de nos spectacles, par exemple, bien que l’opinion de chaque personne puisse être déterminée par l’intérêt ou les préjugés, ce sont néanmoins les sentiments louables qui reçoivent l’approbation la plus générale, et ces témoignages ne peuvent pas être taxés d’hypocrisie. L’hypocrisie, quand il y en a, se trouve dans les cas exceptionnels. Cette considération peut s’appliquer au défaut de lumières et d’instruction ; et c’est ce qui donne tant de force aux arguments sur lesquels s’appuient les partisans des gouvernements républicains. Mais on peut leur opposer que, dans le système monarchique, le roi, de qui dépend la nomination des principaux emplois, a les mêmes intérêts que le peuple ; que ses affaires ne vont pas bien quand celles de la nation vont mal ; et qu’il suffit que le prince entende ses intérêts, pour que ceux du public soient ménagés.

Si c’est un corps d’oligarques qui choisit les fonctionnaires publics, il peut sans doute réunir dans son sein plus de lumières qu’un monarque, quelque bien élevé qu’on le suppose ; mais l’expérience prouve qu’un corps oligarchique, et en général tout corps privilégié, n’emploie jamais ses lumières qu’au profit du privilège, et n’est jamais animé de ces sentiments grands et généreux qui se trouvent, quelquefois, dans le cœur d’un seul homme, quand il se trouve porté à un poste élevé.


Après avoir cherché, Messieurs, dans la première partie de ce Cours, à rectifier nos idées sur la nature et la production des biens qui pourvoient à l’entretien, à l’aisance des nations, nous avons vu que l’institution de la propriété exclusive était le premier des stimulants qu’ait l’homme pour accroître ces biens ; ce qui entraîne la réprobation de tous les moyens injustes, violents, honteux d’y porter atteinte.

Il nous reste à examiner dans les discours qui suivront celui-ci, quels sont les différents systèmes de lois qui ont pour but de favoriser la production ; les règlements que l’on fait relativement à l’industrie manufacturière ; la balance du commerce, les traités de commerce, les primes.