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Page:Say - Œuvres diverses.djvu/264

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refoulé constamment cette industrie vers l’intérieur ; les arts, les manufactures et le commerce intérieur, ont été appelés à pourvoir aux besoins d’une population toujours croissante et accoutumée à se mieux traiter ; car la fièvre des révolutions et des conquêtes n’est pas de ces maladies qui commandent la diète.

Les denrées nécessaires à la consommation de nos ménages, les matières premières de nos manufactures, ont plus que jamais circulé sur ces belles chaussées, restes du moins utiles de la grandeur de Louis XIV et du patriotisme de nos États provinciaux. Mais, à toutes les époques, on s’est plaint de la dégradation de nos routes et des grandes dépenses qu’il fallait faire pour les entretenir, même imparfaitement. Preuve qu’elles étaient fatiguées par de trop lourds fardeaux, et que les différents gouvernements qui se sont succédé, songeaient à se soutenir par d’autres moyens encore que l’amour du bien public, qui cependant est le seul appui solide.

Mais nos grandes routes fussent-elles aussi bien entretenues qu’elles sont fastueuses, les denrées lourdes et encombrantes ne peuvent supporter les frais d’un charroi un peu long. Les seuls favoris de la fortune pourraient se chauffer à Paris, si le bois et la houille n’y parvenaient que par la voie de terre. Les grains et farines, même lorsque leur rareté en élève le prix très-haut, ne peuvent supporter, par terre, un transport éloigné. Dans la dernière disette, l’Alsace mourait de faim, tandis que la Bretagne était dans l’abondance.

Les grands fleuves qui arrosent la France, sont loin d’être utiles autant qu’ils pourraient l’être aux communications commerciales. On peut, si l’on veut, transporter par eau des marchandises de Nantes à Paris. On évite autant qu’on peut d’expédier par cette voie. Malgré la communication plus directe de Rouen à Paris par la navigation, le roulage est encore préféré. La navigation des fleuves est trop souvent entravée, lorsqu’ils n’ont pas des canaux qui sauvent une partie de leurs détours, qui marchent même à leurs côtés, et sur lesquels les bateaux trouvent, en toute saison, une quantité d’eau suffisante, une eau sans courant, sur laquelle ils puissent glisser également bien dans les deux directions.

D’ailleurs, les fleuves fussent-ils en tout temps navigables, il faut bien une navigation artificielle pour passer du bassin d’une rivière dans le bassin d’une autre. C’est l’avantage qui résulte des canaux à point de partage et de l’usage des écluses, de ces encaissements où