Aller au contenu

Page:Say - Œuvres diverses.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

les effets observés ont été en proportion de ces progrès ; et dans ceux où l’on a obtenu des économies considérables, les quantités de produits que les producteurs ont pu consommer ont excédé souvent de beaucoup, non-seulement en quantité, mais en valeur, les produits qu’ils consommaient auparavant, puisqu’en même temps que chaque ouvrier a été aussi bien payé qu’auparavant pour le moins, le nombre des ouvriers est devenu au total plus considérable, et qu’aux profits de la classe ouvrière on a pu ajouter ceux que des capitaux plus considérables, des terres mieux cultivées ont rendus à leurs propriétaires.

On comprend que dans des considérations aussi générales, aussi abrégées, les anomalies sont nécessairement négligées ; il faut balancer les pertes accidentelles par des profits généraux supérieurs, et tenir compte des résultats permanents, plutôt que des froissements qui accompagnent toujours les transitions.

C’est ainsi que l’industrie manufacturière et commerciale du globe, il y a quelques années, et l’industrie agricole en ce moment, ont dû traverser des circonstances difficiles ; mais qu’au total le sort de l’humanité s’est constamment amélioré avec les progrès des arts. La France avait seize millions d’habitants, au temps de Louis XIV ; non-seulement elle en compte près du double, mais je crois être modéré en estimant au double (le fort portant le faible) la consommation de chaque habitant ; elle consommerait dès lors quatre fois plus de produits qu’à cette époque cependant si rapprochée de nous ; et je ne vois pas d’impossibilité à ce que, dans le courant du siècle prochain, une population double de la nôtre ne consomme quatre fois plus de produits que nous n’en consommons actuellement. Toujours est-il vrai que, jusqu’à présent, les produits qui se sont le plus facilement multipliés ont aussi été ceux qui se sont le plus facilement écoulés ; et nous ve-

    se procure maintenant, à Saint-Quentin, pour 75 centimes l’aune des tissus de coton, qu’on payait 9 francs l’aune en 1813. Et il ne faut pas attribuer cette baisse uniquement à la suppression des droits scandaleux qui pesaient sur la matière première ; car, en 1813, malgré les droits, il n’entrait guère, dans une aune, que pour 75 à 90 centimes de coton. La façon seule était donc payée 8 francs ; et maintenant, le coton et la main d’œuvre ensemble ne coûtent que 75 centimes ! Ce n’est point aux dépens des producteurs ; car la ville de Saint-Quentin est une des villes de France qui fait les plus rapides progrès en aisance et en population. Il est impossible d’attribuer cet effet à d’autres causes qu’aux progrès de la filature, du tissage et des apprêts. »

    (Note de l’auteur.)