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Page:Say et Chailley-Bert - Nouveau dictionnaire d'économie politique, supplément.djvu/85

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lions, inférieurs aux frais d’exploitation, et ils ont demandé à la garantie près de 7 millions  ; pour la même année, avec un produit brut de îi millions et une recette nette de 2 millions, la ligne du Mont-Cenis a fait appel à la garantie pour 3 millions. Quant aux lignesd’intérètlocal, dont la longueur exploi- tée est de 3871 kilomètres, elles ont deman- dé à rÉtat 3 autres millions, non compris les sacrifices qu’ont dû faire en leur faveur les départements. Ainsi, pour ces différents chemins de fer, la garantie de l’État a joué, en i8’,i4, à concurrence de 13 millions, ce qui fait ressortir une augmentation de 10 millions par rapporta 1884. De leur côté, les 3266 kilomètres de chemins de fer en exploitation en Algérie, ont eu, en 1894, un rendement de 25 millions de francs, et sauf ceux qui appartiennent à la compagnie de Lyon-Méditerranée, ils ne couvrent pas même leurs frais d’exploitation. Par suite, la garantie d’intérêt à leur allouer a atteint, en 1804, 27 millions, en accroissement de 10 millions sur celle de 1884. Dans ces con- ditions, on n’entrevoit pas la possibilité pour l’État de rentrer jamais dans ses avances, et c’est une raison de plus pour qu’il se montre très réservé vis-à-vis des demandes nouvelles de concessions qui pourront lui être adressées.

Ch. Gouel.

CHERBULIEZ (Antoine-Elisée) est né à Genève le 20 juillet 1797. La famille de son père venait du pays de Vaud. Sa mère était d’origine française  : il descendait par elle d’Isaac Cornuaud qui joua un grand rôle à Genève dans les troubles politiques du xvni’^ siècle.

Après avoir passé quelques années à l’é- tranger, notamment comme précepteur dans une famille russe, Cherbuliez rentra dans sa ville natale, se livra tardivement, mais avec une extrême ardeur, à l’étude du droit et fut reçu licencié en 1826, après avoir sou- tenu une thèse sur les causes naturelles du droit positif. Le barreau, auquel il se consacra momentanément, n’eut pas d’attraits pour lui. Après avoir publié un petit journal, L"f7- tilitaire, quiétait destiné àrépaiulre les théo- ries de Bentham et dont la durée fut courte, il fut nommé en 1831 juge au tribunal civil, puis, en 1835, professeur de droit public et d’économie politique en remplacement de Rossi qui avait quitté Genève pour se fixer à Paris. C’est pendant ce professorat de douze années qu’il publia successivement sa Théo- rie des garanties constitutionnelles (1838), Riche ou pauvre (1840) et La Démocratie en Suisse (1843).


Lorsque le radicalisme devint triomphant .i la suite de la révolution du 7 octobre 1846, Cherbuliez quitta volontairement sa chaire, ne voulant pas servir, même comme professeur, un régime dont il avait, dans l’assemblée législative du canton, vivement combattu l’avènement. Dépourvu de fortune personnelle et chargé de famille, il eut la fâcheuse inspiration d’émigrer à Paris. Il espérait s’y créer une situation grâce à l’appui de M. Guizot auquel il était chaudement recommandé. La révolution de Février bouleversa ses plans. La lutte contre le socialisme vint offrir un aliment à son activité de publiciste  ; il y contribua par quelques opuscules de circonstance  : Le socialisme, c’est la barbarie {i%i%), Simples Notions de l’ordre social (1848), Lettre à Proudhon (insérée d’abord dans le Journal des Économistes, décembre 1848), Le Potage à la tortue, entretiens populaires sur les questions sociales (1849).

Le 18 décembre 1850 il obtint la naturalisation française sous les auspices de MM. Horace et Léon Say, qui lui servirent de parrains. Mais cette démarche ne lui fut d’aucun secours. Découragé, atteint dans sa santé, sentant l’inutilité de ses efforts, il revint en Suisse en 1852 pour occuper à Lausanne une chaire temporaire d’économie politique. 11 y publia en 18 ;J3 son Etude sur tes causes de la misère.

Enfin en i8S5 une situation plus stable et plus digne de son mérite lui fut ofTerte  : le gouvernement de la Confédération l’appela à enseigner la science économique dans le Polytechnicum qui venait d’être créé à Zurich. Tout en continuant sa carrière de publiciste, il se consacra cà cette chaire jusqu’à sa mort survenue le 7 mars 1869. Il avait publié en 1862 un Précis de la science économique et de ses principales applications. L’Académie des sciences morales et politiques se l’était attaché comme membre correspondant.

Indépendamment des ouvrages qui viennent d’être cités, il a fourni de nombreux articles à la Bibliothèque universelle (revue publiée à Genève, ensuite à Lausanne), ainsi qu’au Journal des Economistes. Il serait trop long de les énumérer.

Si l’on voulait essayer de caractériser sommairement les idées de Cherbuliez, on pourrait dire qu’il fut toujours un libéral pessimiste, mais avec une tendance à devenir de plus en plus libéral et de moins en moins pessimiste.

Tout en s’étant promptement dégagé de ce qu’il y a de matérialiste et de terre à terre dans la doctrine utilitaire dont il avait été, au début, un adepte fervent, il était demeuré trop disciple de Bentham pour voir