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Page:Schœlcher - Abolition de l'esclavage, 1840.djvu/102

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au vieux Nègre ses deux fils pour le séduire, il les embrasse, pleure sur leurs têtes, leur dit de choisir entre lui ou les oppresseurs, et reste fidèle aux Noirs. La guerre recommence, il lutte contre les soldats géants de la République française. Forcé de traiter de la paix, il la conclut honorable, rentre dans ses foyers, et lorsque, lâchement trahi par le général Leclerc, il est enlevé de l’île, transporté en France, jeté par ordre de Bonaparte, durant un hiver rigoureux, au fond d’une prison froide, humide, où un homme de son tempérament devait infailliblement périr, il laisse faire, demeure calme, et expire au bout de deux mois, comme un stoïcien de l’antiquité, sans se plaindre d’un mal contre lequel il n’y a pas de remède. – C’est un assassinat par le froid et l’humidité ; il n’est aucune espèce de crimes dont Bonaparte se soit fait faute.

Tel fut ce Noir que « la nation comptait au nombre de ses plus illustres enfants, pour les services qu’il lui avait rendus, pour les talents et la force de caractère dont la nature l’avait doué[1], » tel fut cet esclave, « un des

  1. Lettre du premier consul, déjà citée.