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Page:Schœlcher - Abolition de l'esclavage, 1840.djvu/166

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leur : les serfs russes ont même visage que leurs princes ; dans l’Inde, les parias ont même visage que les brahmes ; en Saxe, les juifs ont même visage que les catholiques ; et les serfs, et les parias, et les juifs n’en sont pas moins honnis. Le préjuge est chose toute morale et non physique ; cela est si vrai, qu’un enfant blanc de la Martinique ou de la Guadeloupe méprise un enfant noir ; mais envoyez un jeune Nègre dans nos collèges, ses camarades regarderont curieusement sa peau le premier jour, et puis ce sera tout ; le lendemain il sera un camarade comme un autre. On rencontre quelques Nègres dans nos ateliers d’Europe, et l’on n’observe pas qu’ils soient jamais maltraités. Le peuple, ne se doutant point que le Noir est un animal immonde, voit en lui un homme, et ne s’offense pas plus de la différence de sa peau que de celle qu’il y a entre des cheveux bruns et des cheveux blonds. On remarque depuis longues années un Nègre dirigeant, l’archet à la main, l’orchestre de Franconi ; je ne sache pas qu’aucun de ses subordonnés semble humilié d’être conduit par lui. Menez cet orchestre à la Martinique, et au bout d’un mois