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Page:Schœlcher - Abolition de l'esclavage, 1840.djvu/169

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mais c’est là un avantage illusoire : la loi a voulu ce qu’elle ne pouvait. Comment concevoir des liens indissolubles entre personnes qui sont hors du droit civil, qui sont mobilier, qu’un créancier peut saisir, que des tiers peuvent revendiquer ? Qu’arrivera-t-il lors de l’affranchissement de l’un des conjoints ? Le mariage sera-t-il dissous ou bien tolérera-t-on la plus monstrueuse anomalie ? L’homme, le chef actuel de la famille, sera-t-il incapable de tout et restera-t-il chose mobilisable, tandis que la femme et les enfants pourront agir civilement ? Ajoutons que l’art. 10 de l’édit de 1685, reproduit textuellement dans les lettres-patentes de 1723, autorise bien le mariage, sans le consentement du père et de la mère de l’esclave, mais non pas sans celui du maître. Or, on comprend que le maître ne le donne pas ; cela le contrarierait trop dans la libre disposition de sa marchandise. Et en effet, pourquoi voudrait-il que les esclaves de son habitation s’accouplassent de manière à ce qu’il ne pût pas les séparer, les vendre, en disposer comme de ses chevaux et de ses autres biens ? Ce serait folie de sa part ; ce serait vouloir violer lui-même son