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Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/71

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de faire travailler et la certitude d’avoir des travailleurs. » Ainsi voilà qui est clair : il faut violer tout ce que la société a de plus sacré pour assurer des ouvriers aux colons : tel est le motif final, la justification unique des horreurs de la traite. C’est pour donner des bras aux colons, qu’il faut nous charger de crimes ; autrement dit, on est en droit de voler parce qu’on n’a pas d’argent. — Jamais Bonaparte, dans toute la puissance de son hideux despotisme, jamais la force dans son plus haut degré d’aveuglement stupide, n’ont raisonné avec tant de brutalité.

Nous en savons plus d’un qui croient se justifier en disant : « Du moment où les nègres sont assez avilis, assez dépourvus de tout sentiment de dignité humaine pour se vendre réciproquement à des étrangers, ils méritent l’esclavage. » Eh ! mon dieu ! nous ne craignons pas de prendre nos adversaires eux-mêmes à témoin ; ne croient-ils pas que si les Turcs et les Chinois venaient acheter des Français sur nos marchés, il s’élèverait immédiatement parmi nous, nous le peuple le plus fier de la terre, des trafiqueurs d’esclaves blancs, qui ne manqueraient jamais de marchandise ? ne pensent-ils pas avec moi qu’il se répandrait dans tous nos villages de hardis voleurs d’hommes, et que plus d’un père peut-être irait secrètement au marché recevoir le prix de