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Page:Schœlcher - Le procès de Marie-Galante, 1851.djvu/42

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avons vécu parmi des hommes qui valaient mieux que vous. »

« Me Percin répond qu’il est ici en vertu de l’indivisibilité du territoire français, et demande acte des paroles du procureur général. — Refus du président.

« Le procureur général s’écrie : Si Me Percin continue, nous prendrons des réquisitions contre lui.

« On remarque un sourire sur les lèvres de Me Percin, qui reprend sa plaidoirie. » (Compte-rendu du Progrès, 21 avril.)

Nous n’insisterons pas sur ces luttes déplorables, sur ces tentatives d’intimidation, en public, à l’audience ; mais que n’autorisent-elles pas à croire, relativement à ce qui a pu se passer entre les magistrats instructeurs et les prévenus, lors des premiers interrogatoires, loin de toute publicité ?

Les rétractations nombreuses qui viennent d’être mentionnées, le ministère public les a constatées, en disant : « Pendant deux jours, nous avons eu le triste spectacle d’hommes amenés devant la justice et poussant l’aveuglement jusqu’à prétendre que le conseiller instructeur avait imaginé ces déclarations. » Après cela, le chef du parquet n’a pas craint d’ajouter, s’adressant à la Cour : « Ces interrogatoires vous appartiennent, messieurs ; vous avez le droit de rechercher s’ils renferment la vérité, ou si elle se trouve, au contraire, dans les rétractations faites à l’audience. Voire choix ne saurait, être douteux. »

Les juges ont prononcé, nous n’avons pas le droit de critiquer leur verdict, mais un fait aussi grave que la rétractation des accusés et de beaucoup de témoins, au grand jour de l’audience et de la publicité, ne pouvait être passé sous silence : alors surtout que l’accusation est fondée presque tout entière sur les premiers interrogatoires subis dans le huis-clos du cabinet du juge d’instruction, par des hommes qui ne savent ni lire ni écrire ; alors surtout que ces hommes, dès qu’ils entendent aux débats la lecture de leurs déclarations, protestent énergiquement contre leur inexactitude, accusant, selon les propres expressions du ministère public, accusant le conseiller instructeur d’avoir imaginé les déclarations qu’il leur attribue. Sans l’accuser, sans porter la moindre atteinte à son honorabilité, ne peut--