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Page:Schœlcher - Le procès de Marie-Galante, 1851.djvu/41

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autre exemple dans le compte-rendu du Progrès du 31 mars :

« Médéric : Il n’y aura jamais l’ordre à Marie-Galante ; les blancs de là détestent trop la liberté. Ils battent les citoyens. Quand nous avons été à la geôle, ces messieurs entraient, et, comme les gendarmes, ils nous frappaient.

« Le procureur général : On ne bat pas dans les geôles. Je suis autorisé à dire que vous en imposez à la justice. Les gendarmes ne battent pas ; ils arrêtent, et cela avec beaucoup d’humanité.

« Médéric : Ce que j’ai dit est vrai. Oui, on nous bat. J’ai reçu deux coups de corde. Nous avons été en butte à des violences extrêmes. On nous a même menacés, à la geôle, de nous faire couper la tête dans la savane, et nous nous y attendions à chaque instant.

« Le procureur général : Vous en avez menti !!! »

Rapporterons-nous, enfin, cet incroyable incident, qui a interrompu dans sa défense le jeune et courageux avocat mulâtre, Me Percin, au moment où, prêtant l’appui de sa brillante parole à M. Alonzo, l’un des principaux accusés, il disait : « Fort de notre innocence, nous avons demandé une enquête, et l’on n’a pas osé la faire. »

Sur les observations du procureur général, relevant les mots on n’a pas osé, le président dit « que le mot s’explique par l’improvisation de la défense, et qu’il laissera le soin de le retirer ; qu’il n’y voit aucune mauvaise intention. »

Me Percin répond « qu’en matière d’improvisation, la faute est moins à celui qui laisse échapper un mot qu’à celui qui le relève. »

M. Rabou n’accepte pas que le ministère public fasse de faute ; puis, s’adressant au jeune défenseur, il laisse entendre ces inconcevables paroles, que l’on a peine à croire sorties du banc d’un procureur général :

« Quel est cet étranger qui vient insulter ici le ministère public sur son siège, sans égard aux bonnes relations qui lient la magistrature au barreau ? Quels sont ses antécédents ? D’où vient-il ? Quel est-il ? Me Percin, qui semble connaître l’antiquité, nous forcera de lui rappeler ces mots d’un vieillard à des jeunes gens de la Grèce : « Nous