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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/75

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de la déesse de la beauté. Mais c’est pour passer tout de suite à l’idée que la plus grande des œuvres d’art, c’est l’humanité, au façonnement de laquelle travaille continuellement ce qu’il appelle ici l’Univers, en 1806 il dira « la Divinité ». Dans un des mouvements de rhétorique qu’il provoque volontiers en lui-même, il anthropomorphise ce principe divin en le présentant comme le Grand Artiste, dont il invite ses amis à interpréter les œuvres : ces sociétés humaines diverses, qui sont comme autant de tableaux dont l’histoire nous met sous les yeux la galerie. Le spectacle qu’elle offre ainsi peut servir la religion, et lui rendre de la sorte les soins reçus d’elle à l’origine des civilisations — quand, histoire et poésie, science et religion se confondaient. Ce spectacle, donné par la diversité des sociétés humaines, c’est, l’auteur n’a pas besoin de le rappeler, un de ceux qui attestent la variété des manifestations infinies de l’Infini, des réalisations terrestres du divin. Sans insistance inutile, ce troisième discours se termine ainsi par une nouvelle application de l’idée qui est l’inspiratrice, et l’âme, de cette œuvre de jeunesse du théologien romantique.

QUATRIÈME DISCOURS

SUR L’ESPRIT DE SOCIÉTÉ DANS LA RELIGION
OU SUR L’ÉGLISE ET LE CLERGÉ

C’est à l’esprit sociable et social que Schleiermacher entend rattacher ce qu’il tient à dire au sujet de l’Église, de son organisation, des rapports dans son sein entre clergé et laïques, enfin de ses relations avec l’État.

Cette notion, il est intéressant de constater le rôle qu’elle joue ainsi. Il y a là un aspect de l’esprit romantique qu’il convient de mettre en lumière. Cet aspect est celui de la proportion, dans cet esprit, entre la tendance individualiste et le sens social. Schleiermacher invite ici à compléter ce que ses idées sur l’immortalité, dans le second discours, ont pu suggérer sur l’individualisme romantique.

Beaucoup de définitions du romantisme, et par conséquent de jugements sur lui, partent de l’idée que ce premier romantisme allemand, instigateur de l’esprit européen de ce nom