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Page:Schopenhauer - Éthique, Droit et Politique, 1909, trad. Dietrich.djvu/127

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règle peut-elle être erronée, tandis que l’instinct est infaillible[1].

Il y a donc trois espèces d’a priori donnés :

1° La raison théorique, c’est-à-dire les conditions de la possibilité de toute expérience ;

2° L’instinct, règle pour atteindre un but inconnu favorable à mon existence matérielle ;

3° La loi morale, règle d’une action sans but.

1° L’acte raisonnable ou intelligent se produit d’après une règle conformément à une idée de but ;

2° L’acte instinctif, d’après une règle sans idée de but ;

3° L’acte moral, d’après une règle sans but.

De même que la raison théorique est l’ensemble des règles conformément auxquelles doit se dérouler toute ma connaissance, c’est-à-dire tout le monde expérimental, ainsi l’instinct est l’ensemble des règles d’après lesquelles doivent se dérouler tous mes actes, si nul trouble ne survient. Aussi le nom de raison pratique me semble-t-il le mieux approprié à l’instinct : car ce nom détermine, comme la raison théorique, la mesure de toute expérience.

La loi morale, au contraire, n’est qu’une vue unilatérale, prise du point de vue de l’instinct, de la conscience meilleure, qui gît au delà de toute expérience, c’est-à-dire de toute raison, aussi bien théorique que

  1. Dans le livre de Jacobi, Des choses divines et de leur révélation, p. 18 (1811), on trouve un mélange de la conscience meilleure avec l’instinct par un syncrétisme dont seul est capable un esprit aussi antiphilosophique que Jacobi.
      (Voir sur Jacobi la note d’Écrivains et style, p. 143.)