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Page:Schopenhauer - Mémoires sur les sciences occultes.djvu/278

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ESSAI SUR L’APPARITION DES ESPRITS

c’est que, pendant la prétendue réponse de son interlocuteur imaginaire elle se taisait, manifestait une grande attention, se dressait sur son lit, tournant la tête d’un certain côté pour écouter les réponses et répliquer elle-même. Elle s’imaginait avoir présente devant elle la vieille Karen avec sa servante et parlait alternativement avec celle-ci et avec celle-là… Ce dédoublement apparent de sa propre personnalité en trois personnes diverses, comme c’est l’ordinaire dans le rêve, allait si loin, que je ne pouvais pas convaincre la voyante que c’était elle-même qui faisait les trois personnages. » De cette sorte, à mon avis, sont donc aussi les conversations d’esprits de la voyante de Prévorst ; et cette explication trouve une confirmation sérieuse dans l’inexprimable absurdité du texte de ces dialogues et de ces drames, qui répondent tout juste à la mentalité d’une montagnarde ignorante, avec la métaphysique populaire qui peut être la sienne, et auxquels on ne saurait attribuer de réalité objective, qu’à la condition d’admettre la possibilité d’un ordre du monde d’une absurdité sans limite, d’une sottise révoltante, et telle qu’on devrait avoir honte d’en entendre parler. Si Kerner, si prévenu et si crédule, n’avait pas eu secrète-