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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/107

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L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


avertissements de Marguerite que j’avais vivement en esprit. Je voulais devenir une grande actrice, cela était une résolution inébranlable, mais j’étais tout aussi résolue à jouir de tout ce que mon sexe pouvait goûter sans danger. Il ne s’agissait donc pas de m’abandonner à un petit blanc-bec sans expérience ! Je m’éveillai donc au moment où il s’agenouillait hors de lui ; je regardais avec des yeux épouvantés le téméraire, et d’un seul mouvement de côté il perdit tous les avantages de la position.

Vous avez toujours loué mon grand talent de comédienne. Ici, il se passa une belle scène, vous auriez eu l’occasion d’admirer la vérité de mon jeu. D’un côté, reproches, déception, pleurs ; de l’autre, peur, trouble, honte. Il oubliait de cacher la véritable nouveauté de la situation, ce qui m’était très agréable, car sous mes larmes et mes sanglots je pouvais satisfaire ma grande curiosité. Je pouvais me féliciter de ma ruse, j’avais gagné un jeune homme très robuste. L’explication fut très simple. Je lui prouvai qu’il m’avait déshonorée, qu’il devait quitter la ville si je voulais me plaindre de sa conduite éhontée. Je l’aurais chassé, et il ne serait plus revenu, si je ne lui avais avoué que j’avais un faible pour lui et que depuis longtemps j’avais remarqué son amour. Je lui pardonnais sa faute à cause de sa grande passion. Je lui dis cela avec conviction et tout naturellement ; il me crut sur parole. Il s’apaisa peu à peu, se montra très visiblement respectueux, timide et honteux de ce qu’il appelait son crime, et tout se