sance quand il était si hors de lui, je regrettais presque
de croire que ma beauté était cause de tant de
hâte virile. J’en goûtais par contre beaucoup quand,
après une courte pause et un moment de conversation,
il renaissait peu à peu, quand ce joli garçon,
chef-d’œuvre de la nature, recouvrait toutes ses forces.
Quel délicieux jeune homme ! tout en lui sentait la
jeunesse, et les soins qu’il prenait de lui-même lui conservaient
cette jeunesse. Comme il était ravissant aux
moments où il me regardait ! Dois-je cacher, après
avoir tout dit, que dans un moment d’enivrement je
couvrais de mes baisers sa jolie tête bouclée, que je
m’attardais longtemps à sa nuque et à son oreille
droite qui s’ourlait comme un coquillage et que je
préférais à son oreille gauche, je ne sais pas pourquoi
d’ailleurs, car ses deux oreilles, comme chez tout le
monde, se ressemblaient parfaitement. Aujourd’hui
encore, le sang bout dans mes veines quand j’y pense,
et vraiment je ne regrette rien de tout ce que j’ai fait
alors. Mais ce que j’ai fait plus tard m’a donné des
remords, d’amers remords, et je dois à votre amitié
désintéressée que ces remords n’aient pas empoisonné
le restant de ma vie. Je l’ai éprouvé moi-même,
l’on n’ose pas jouer impunément avec le feu, et les
principes les plus forts peuvent être trahis par un
tressaillement momentané des nerfs, une humeur
noire de notre intérieur. Ça serait bien triste si une
jeune fille, à la lecture de ces lettres, avait envie d’agir
comme je l’ai fait dans des circonstances particulières.
Si, par exemple, elle s’adonnait plus d’une seule fois
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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE