Aller au contenu

Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


127
MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


toutes les jeunes femmes ; elle se mit tout de suite à m’instruire, et plus je faisais l’innocente, et plus ce qu’elle me racontait me semblait invraisemblable, plus elle s’entêtait à vouloir m’éclairer, plus ses lèvres me contaient ce dont son cœur était plein. D’ailleurs elle prenait grand plaisir à me révéler ces choses. Mon étonnement la stupéfiait, elle ne pouvait croire qu’une jeune artiste qui jouait avec tant de feu ignorât tout. Déjà au quatrième jour après mon arrivée, nous prîmes un bain ensemble ; l’enseignement pratique ne pouvait pas manquer, après tant de beaux discours. Et plus j’étais gauche et empruntée, plus elle s’amusait à exercer une novice. Plus je faisais de difficultés, plus elle s’enflammait. Pourtant au bain et en plein jour, elle n’osa pas dépasser certains chatouillements et badineries ; je compris qu’elle allait employer toute sa ruse pour me décider à passer la nuit avec elle. Le souvenir de la première nuit passée dans le lit de Marguerite m’envoûta d’une telle façon que je vins à mi-chemin au-devant de son désir. Je le fis avec tant d’ingénuité qu’elle se convainquit encore plus de mon innocence. Elle croyait me séduire, et c’était moi qui la pliais à mon caprice. Sa chambre à coucher était des plus charmantes ; elle était meublée avec tout le luxe que seul un riche banquier peut s’accorder et avec tout le raffinement qu’un fiancé prépare pour la nuit d’hyménée. C’est là que Roudolphine avait été faite femme. Elle me raconta dans tous les détails son expérience et ce qu’elle avait ressenti quand la fleur de sa virgi-