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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/172

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


insensible avant d’aller à la pratique. Je ne pouvais plus penser à l’amour, et quand je pensais aux sensations qu’il procure, elles me paraissaient fades, vides. J’étais radicalement guérie de toute démangeaison voluptueuse qui peut être dans le corps humain. Je commençais à comprendre l’état d’esprit des castrats masculins. »

Denise me raconta encore beaucoup de choses sur ce sujet. Elle me croyait complètement inexpérimentée dans la pratique. Elle soupçonnait que je connaissais le soulagement manuel ou le plaisir que l’artifice peut procurer, ou même l’étreinte de personnes de mon sexe ; mais elle pensait que j’ignorais complètement l’homme. La feinte est innée chez la femme, ainsi que la vantardise chez l’homme. Elle me demanda si j’avais jamais lu un de ces livres dont elle m’avait parlé. À ma réponse négative, elle me conseilla de commencer immédiatement par la Justine et la Juliette de Sade.

« Quelques médecins prétendent, disait-elle, que le camphre a la vertu d’éteindre le chatouillement sexuel de la femme.

« Je ne sais pas si cela est vrai. Mais le livre de Sade étouffa durant des mois toute pensée, tout désir de volupté et de débauche.

« Quelle imagination ! Est-il possible que de telles choses se passent ? Les hommes sont là-dedans des tigres et des hyènes ; les femmes, des boas et des alligators. Ce qu’on y trouve le moins, c’est la sexualité naturelle. Les femmes caressent des femmes, les