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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/174

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


que sainte Madeleine, qui a eu également une jeunesse assez agitée et orageuse.

Vers la fin de la deuxième année, je reçus beaucoup d’offres d’engagement de différents théâtres de l’Allemagne, de l’Autriche et de la Hongrie. J’avais de la peine à me décider, quand arriva M. R…, alors intendant des théâtres de Budapest. Il venait expressément à Francfort pour me faire ses propositions oralement.

Deux messieurs l’accompagnaient un riche propriétaire foncier, le baron Félix de O…, grand dilettante de musique, un homme très aimable, très beau et très riche. Il me fit la cour immédiatement et me promit un revenu beaucoup plus considérable que celui de l’intendant théâtral. En acceptant, je me serais déshonorée à mes propres yeux. Il me répugnait de vendre mes faveurs à Mammon ; aussi je refusai ses offres.

L’autre monsieur était le neveu de l’intendant, un jeune homme d’à peine dix-neuf ans, joli, timide, honteux comme un petit paysan. C’est à peine s’il osait me regarder, et quand je lui parlais, il rougissait comme une pivoine. Le baron de O… en disait beaucoup de bien, que c’était un génie et qu’il jouerait un grand rôle dans sa patrie. Vraiment, cela valait la peine de recevoir les prémices d’un tel jeune homme. Si un puceau ignora jamais la théorie et la pratique des doux secrets de Cythère, c’était bien le jeune Arpard de H…, fils de la sœur de l’intendant hongrois.

Ces messieurs ne restèrent que deux jours à Francfort ; ils allaient à Londres et à Paris pour acquérir quelques opéras à la mode.