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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/204

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


caresse est douce. C’est si bon… Ah !… ah !… ne terminez pas, caressez mon front, lentement. Maintenant, rafraîchissez aussi de vos mains froides ma nuque et mes joues.

J’avais envie de remplacer Anna auprès de la fille. Anna remarqua le changement de ma physionomie. Elle cessa son jeu et me demanda :

— Voulez-vous essayer ? Et toi, Nina (elle s’adressait à Mme de B…), ne reste pas ainsi comme une bûche. Amuse-toi avec mademoiselle.

Mme de B… éclata de rire. Elle se mit à l’aise et je fis de même. Anna ne suivit point notre exemple, et pour cause : un corps aussi abîmé que le sien nous aurait enlevé toute envie de plaisanter.

Nina (Mme de B…) était encore très belle, elle avait un plus beau corps que ma mère. Elle n’avait jamais eu d’enfants ; son ventre n’avait pas de rides et n’était pas détendu comme on l’aurait attendu à son âge. Elle avait au moins cinquante ans, à en juger sur son visage. Pourtant elle avait moins de chance auprès des hommes qu’Anna, qui était beaucoup moins belle. Elle n’était pas lubrique ; on aurait dit une statue de marbre, inanimée. Maintenant aussi, elle restait complètement froide.

Je pris la place d’Anna aux genoux de la fille.

Comme Anna avait interrompu le jeu, la bonne volonté qu’il faut de part et d’autre dans tout amusement humain avait fini par disparaître. Je dus tout recommencer. Cela dura longtemps. Nina s’était agenouillée auprès de moi, elle m’enlaçait de sa main