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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/229

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L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


anormalités. L’ivresse avait dû me dominer, ou une vague d’inconscience, quand je m’étais laissé aller à ce que, dans mon bon sens, je n’aurais jamais fait. Les hommes sont ainsi faits. Souvent ceux qui, dans leur sens ordinaire, ne voudraient pas se départir de leur respectabilité, s’émancipent vite dans l’état d’ivresse. Je pensais ainsi ; aujourd’hui je pense autrement. Vous savez ce que j’ai dit pour justifier certaines pratiques et certains désirs pervers ou anormaux. Après avoir vu ce vieillard, tout me dégoûta, aussi bien les plus violents désirs et les envies maladives que les relations naturelles avec Rose ou avec un homme. J’aurais chassé Arpard s’il était venu et s’il m’avait priée ; et je chassai Rose quand elle voulut passer la nuit avec moi.

Je ne pouvais oublier l’épouvantable spectacle auquel je venais d’assister, je passai une nuit agitée, rêvant à de pires infamies, et, le lendemain, je fus de méchante humeur.

À dix heures du matin, je devais assister à une répétition générale. J’étais presque tout le temps sur la scène. Cette répétition, quoique pénible, changea mon humeur en chassant ces vilaines images.

Parmi les personnes qui assistaient à cette répétition, je remarquai immédiatement un étranger qui me fit une grande impression. C’était un très bel homme, très élégant, avec un visage intelligent. Un de mes collègues l’avait amené. C’était un amateur d’art et un grand dilettante. Quand le ténor chanta un passage à fausse voix, il le remplaça et chanta ce