Aller au contenu

Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


260
L’ŒUVRE DES CONTEURS ALLEMANDS


était un parfait épicurien et étudiait la nature humaine ; ses opinions s’harmonisaient avec les miennes. J’appris à mieux me connaître, grâce à lui. Il m’expliqua bien des choses dont je n’avais pas la clé. Je savais depuis longtemps que la nature de la femme est tout autre que la nature de l’homme, mais je n’avais pu deviner pourquoi. Il m’en donna les raisons physiologiques et psychologiques. Sa philosophie était simple et claire ; il était impossible d’affaiblir ses principes, basés sur la raison. Il n’était pas du tout cynique ; dans la société, on le prenait pour un homme très moral, bien qu’il ne feignît aucune vertu. Il me faisait doucement la cour, non pas pour atteindre ce que tout homme convoite, mais parce que j’étais capable d’écouter et de comprendre ses paroles. Pourtant, je remarquais qu’il aurait été très heureux de me posséder corporellement. Ceci est naturel. Je ne suis pas un Narcisse féminin, mais j’ai conscience de mes qualités physiques et spirituelles ; je n’ai qu’à me regarder dans un miroir et à comparer ma beauté à celle des autres femmes. Vous m’avez avoué vous-même que vous n’avez jamais vu un corps féminin aussi bien proportionné que le mien, et ceci bien des années après ma connaissance avec sir Ethelred Merwyn.

J’étais piquée d’entendre l’Anglais faire continuellement ma louange, sans jamais essayer d’attaquer mon cœur ou quelque chose d’autre, — on dit cœur par euphémisme. Ma coquetterie était vaine. Il m’avait tout expliqué ; mais je voulais encore savoir pourquoi il se faisait stoïque avec moi.