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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/270

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE

Le temps passait très vite en compagnie d’un aussi galant homme. Nous étions très tempérants quant à l’amour. Il était toujours prêt à de nouveaux jeux, mais je craignais pour sa santé. Je l’aimais trop pour ne pas vouloir lui épargner une humiliation.

Nous allâmes à Rome et sir Ethelred tint parole le troisième jour. Il dut payer une immense somme pour pouvoir contenter ma curiosité.

La veille au soir, il y avait eu deux exécutions au garrot. Un brigand des Abruzzes et sa femme, une ravissante personne, furent étranglés place Nacona. Sir Ethelred avait loué une fenêtre proche de la potence. À travers ma lorgnette, je pouvais suivre tous les mouvements musculaires du visage de ces deux malheureux ; je soutirais cruellement. Je ne pouvais oublier ces deux visages d’épouvante. Sir Ethelred lisait dans mes pensées, il me dit :

— Vous les reverrez encore.

Je restai quinze jours à Rome. La fin de mon séjour fut troublée par la mort subite de mon ami. Il mourut de la malaria, cette terrible épidémie qui a déjà fait tant de victimes. Je ne l’abandonnai point jusqu’à son dernier souffle ; je lui fermai les yeux. Dans son testament, il me léguait toute sa fortune, ses pierreries et ses antiques qu’il avait collectionnés dans ses voyages.

Cette mort inattendue me dégoûta de l’Italie et je fus heureuse de signer un engagement avec un imprésario qui m’emmenait à Paris, à l’Opéra-Italien.