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Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/217

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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

l’issue. À l’épaisse fumée qui enveloppait les deux partis, il était facile de juger que les presbytériens se défendaient vaillamment. D’un autre côté, de continuelles décharges, partant des points les plus rapprochés, attestaient la persévérance des troupes royales. Enfin, des chevaux privés de leurs maîtres, mais qu’à leur harnachement on reconnaissait pour appartenir au régiment des gardes, furent aperçus courant çà et là ; des soldats démontés se dirigèrent du côté de la montagne ; un grand nombre de fuyards ne tardèrent pas à les suivre, et il n’y eut plus moyen de douter du résultat de la journée. Les prisonniers purent se réjouir de leur prochaine délivrance.

— Ils fuient ! ils fuient ! s’écria Mause avec transport,

— Ma mère, retenez votre langue ! lui cria Cuddy ; allez plutôt rejoindre Kettledrummle. Ces infernales balles ne connaissent personne, et elles tueraient une vieille femme qui psalmodie tout comme un dragon qui jure.

— Ne craignez rien pour moi, Cuddy, répondit la vieille fanatique ; je veux monter sur cette éminence, et élever la voix contre ces hommes du pays des Gentils.

Elle aurait accompli son dessein, si Cuddy ne l’eût retenue.

— Oh ! Milnwood, dit-il alors, a-t-on jamais vu mortel se battre comme ce démon de Claverhouse ? Trois fois il a été entouré, trois fois il a su se dégager. — Mais je crois que nous ne tarderons pas à être libres : Inglis et ses dragons tournent à tout moment la tête, comme s’ils préféraient la route qui est derrière eux.

Cuddy ne se trompait pas. Dès qu’Inglis et ses soldats s’aperçurent que Claverhouse remontait la montagne, poursuivi par la cavalerie, ils ne jugèrent pas à propos de rester là plus longtemps, et s’enfuirent.

Morton et la vieille, dont les mains étaient libres, s’empressèrent de détacher les liens de Cuddy et du prédicateur ; et comme ils terminaient cette besogne, le reste des dragons arrivait. Le désordre et la confusion régnaient dans leurs rangs : ils formaient pourtant encore un peloton d’environ quarante hommes. Claverhouse était à leur tête, lord Evandale marchait le dernier, les exhortant à tenir ferme.

Ils passèrent à peu de distance de l’endroit où se trouvaient les prisonniers. Mause, les yeux rayonnants de joie et d’enthousiasme, ses cheveux gris agités par le vent, semblait une vieille bacchante ou une sorcière de Thessalie dans les transports d’une fureur prophétique. Aussitôt qu’elle reconnut Claverhouse, elle s’écria avec une amère ironie : — Arrêtez ! vous qui aimiez tant à assister aux assemblées des saints ; qui parcouriez tous les déserts d’Écosse