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Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/101

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ouvrage plutôt que Lohengrin ? Sans doute parce que, de tous ses opéras, c’était celui dont les Parisiens avaient le plus entendu parler. Nous avons vu que, dès 1849, Liszt avait publié un compte rendu du poème dans le Journal des Débats. Les touristes de Bade avaient pu le voir jouer sur les petites scènes allemandes ; les journalistes présents, dans l’été de 1857, à la représentation de Wiesbaden, l’avaient analysé longuement. On connaissait l’ouverture avant les auditions du Théâtre-Italien, pour l’avoir entendue à la Société Sainte-Cécile ou au concert de Paris. Le style musical de cette œuvre ne s’écartant pas notablement des formes consacrées de l’opéra français, Wagner pouvait croire qu’elle serait favorablement accueillie[1]. Il comptait sans le caractère mythique du sujet dont la donnée parut puérile et ridicule aux Parisiens, et sans la légende de la musique de l’avenir qu’il avait essayé de combattre dans sa réponse à Berlioz et que toute la presse devait ressusciter après la publication de la lettre à F. Villot. Ces deux causes ont largement contribué à l’insuccès de Tannhœuser et les amis français du maître ont été bien mal inspirés à ne pas lui conseiller de jouer la partie sur Lohengrin, œuvre très supérieure à Tannhœuser comme intérêt musical et dramatique et dont la donnée plus mouvementée et

  1. Déjà, dans sa relation des fêtes de Weimar en 1850, Gérard de Nerval écrivait : « Ce dernier opéra (Tannhœuser) a paru un essai moins heureux de l’idée qu’il poursuit de l’alliance intime de la poésie et de la musique. »