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Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/102

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plus humaine, malgré son caractère légendaire, aurait ému davantage un public français. Le rôle d’Elsa, par exemple, bien plus développé et autrement pathétique que celui d’Elisabeth, confié à une chanteuse comme Marie Sax, aurait enlevé tous les suffrages.

Quoi qu’il en soit, Wagner s’était arrêté à ce malheureux choix de Tannhœuser. M. Léon Leroy[1], l’un des plus anciens admirateurs du maître allemand, avec Gasperini, ayant été faire visite à l’artiste, dès son arrivée à Paris, celui-ci le pria aussitôt de lui trouver un traducteur pour Tannhœuser. M. L. Leroy pensa à Roger, l’ancien ténor de l’Opéra, qui vivait retiré au château de Villiers-sur-Marne. Wagner et lui s’étant rendus à Villiers, le maître se mit au piano et le chanteur déchiffra la partition de Tannhœuser, avec une sûreté qui enthousiasmait l’auteur. Mais Roger n’ayant pu s’occuper de ce travail, l’adaptation du livret avait été confiée à Edmond Roche, dont nous avons déjà parlé. Rendons ici la parole à M. Sardou.

« La traduction du Tannhœuser prit à Roche une année entière du travail le plus assidu, le plus exténuant ; il y prodigua ses jours et ses nuits. Il faut l’avoir entendu raconter tout ce que lui faisait souffrir l’exigence de ce terrible homme, comme il l’appelait. Le dimanche, jour de repos à la douane, était naturellement celui que Wagner accaparait

  1. Voir l’article de M. Léon Leroy dans Bayreuther Festspielblœtter in Wort und Bild, Munich, 1884.