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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 15.djvu/102

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SONNETS.

et, perdant leur grâce naturelle sous des charmes frelatés, se ruiner, riches pitoyables, dans l’admiration d’eux-mêmes ?

Non ! laisse-moi seulement te servir dans ton cœur. Accepte mon affection, pauvre mais sincère offrande, où nul autre que toi n’a part et où l’art n’est pour rien, simple don de mon âme en échange de ton âme !

Arrière, temps, délateur suborné ! c’est quand tu l’accuses le plus violemment qu’une âme fidèle reconnaît le moins ton contrôle.


*

LXXXIII

Ceux qui ont le pouvoir de faire le mal et ne le font pas, ceux qui n’exercent pas la puissance qu’ils semblent le plus avoir ; ceux qui, remuant les autres, sont eux-mêmes comme la pierre, immuables, froids et lents à la tentation,

Ceux-là héritent légitimement des grâces du ciel et économisent les richesses de la nature. Ils sont les seigneurs et maîtres de leur visage, et les autres ne sont que les intendants de leur excellence.

La fleur de l’été est un parfum pour l’été, bien que pour elle-même elle ne fasse que vivre et mourir. Mais que cette fleur vienne à se flétrir, la plus vile ivraie en éclipsera la valeur.

Car les plus douces choses s’aigrissent par l’abus, et les lis qui pourrissent sont plus fétides que les ronces.