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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 15.djvu/61

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SONNETS.

Aussi je mens avec elle, et elle ment avec moi, et nous nous leurrons sur nos défauts par des mensonges.

XVII

Mon amour est comme une fièvre toujours altérée de ce qui l’alimente incessamment : il se nourrit de ce qui perpétue sa souffrance pour satisfaire son appétit troublé et morbide.

Ma raison, médecin de mon amour, fâchée de ce que ses prescriptions ne sont pas suivies, m’a abandonné, et moi, désormais désespéré, je reconnais que l’affection que combattait la science est mortelle.

Ma raison étant impuissante, je suis désormais incurable, et je délire frénétiquement dans une incessante agitation. Mes pensées et mes paroles sont, comme celles des fous, de vaines et fausses divagations.

Car j’ai juré que tu es blanche et cru que tu es radieuse, toi qui es noire comme l’enfer et ténébreuse comme la nuit.

XVIII

Hélas ! comment l’amour m’a-t-il mis en tête ces yeux qui ne sont pas en rapport avec la réalité ? Ou, s’ils y sont, où mon jugement s’égare-t-il pour apprécier si faussement ce qu’ils voient juste ?

Si celle dont mes yeux prévenus radotent est belle,