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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/227

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délectant de la contemplation de Dieu[1]. » C’est déjà cette contemplation que la modeste Abigail a présentée à David, comme le suprême bonheur auquel l’homme puisse aspirer : « Que l’âme de mon maître puisse participer au faisceau de vie avec l’Éternel ton Dieu ! c’est-à-dire, ajoute Rabbi Eliézer, qu’elle puisse s’asseoir avec les âmes de tous les justes, à l’ombre du trône glorieux de l’Être des êtres[2] ! » C’était encore à cette contemplation qu’aspirait le psalmiste lui-même quand, dans ses moments de sainte langueur vers la vraie félicité, il s’écrie : « O que ne puis-je voir, mon Dieu, ta face dans l’innocence et, en me réveillant, me délecter de son image[3] ! » Ce n’est qu’elle enfin que les rabbins ont en vue, chaque fois qu’ils parlent de cette « mystérieuse muraille derrière laquelle Dieu est assis, entouré de myriades de justes et d’anges célestes[4] ».

D’ailleurs, pour résumer d’un mot toutes nos pensées à cet égard, il se comprendrait que des hommes qui feraient consister le bonheur d’ici-bas dans les jouissances matérielles et qui s’appliqueraient, durant leur vie terrestre, à goûter la plus grande somme possible de ce genre de bonheur, transportassent au-delà du tombeau le complément de leurs espérances et de leurs aspirations toutes sensuelles. Mais que les Elie, les Samuel et tous les prophètes de la Bible, que les Hébreux en général, qui furent constamment les adorateurs de la vérité, eussent soudainement consenti à écarter, à sacrifier, à perdre l’image de cette vérité, en arrivant précisément au lieu où on la savait devoir exister dans sa splendeur et son plus vif éclat ; à qui se flatterait-on de persuader une telle anomalie ? Quoi ! lorsque durant une

  1. Talmud, traité Berachoth, v. 17.
  2. Voir Livre de Samuel, chap. XXV, v. 29, et Talmud, traité Schabb, p. 152.
  3. Ps., chap. XVII, v. 15.
  4. Talmud, traité Schab., p. 149.