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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/388

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aboutir à la persécution, a été toujours formellement et énergiquement condamné par la Synagogue. Nous n’en voudrions pour preuve que la réflexion suivante faite par le Talmud à propos du massacre des prêtres de Baal amenés par le prophète Élie sur le Mont-Carmel. « Élie, dit-il, a été enlevé au ciel pour avoir, dans cette occasion, témoigné d’un zèle coupable. Ce n’est pas d’hommes tels que lui que la terre a besoin[1]. »

Ni haine ni excès d’amour, ni indifférence ni sollicitude exagérée pour notre prochain, grand désir de le voir heureux, mais aussi grand respect pour tous les moyens qu’il emploie à le devenir, des conseils, mais pas de contrainte, une constante préoccupation de notre part à lui fournir des occasions d’augmenter sa tranquillité comme son bien-être moral et matériel, mais aussi une attention non moins scrupuleuse et continuelle à le laisser libre d’en profiter à sa guise ou de n’en point profiter du tout, c’est là le milieu où doit se tenir la charité. Tout ne doit pas se traduire en sentiment chez l’homme ; il a aussi sa raison, il a l’idée du devoir, celle du droit qui y correspond, et enfin la liberté comme fondement de l’un et de l’autre. L’important est de ne rien retrancher à toutes ces qualités, de n’en défigurer aucune, de n’en sacrifier aucune. Il faut que toutes se tiennent, se donnent pour ainsi dire la main et s’équilibrent les unes par les autres ; que si, par exemple, l’amour s’éprend de trop vives ardeurs, le culte du droit en vienne arrêter l’explosion et nous apprenne à ne pas nous exalter jusqu’à l’intolérance ; que si, au contraire, par trop de respect pour la liberté d’autrui, nous en venions à nous retrancher dans un froid égoïsme, le devoir soit là et nous

  1. Voir traité Pesachim, page 66.