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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/460

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les apôtres lui appliquer ce verset d’Isaïe : « Ainsi, a dit l’Éternel, le ciel est mon trône et la terre mon marchepied. Quelle maison me bâtirez-vous ou quel pourrait être le lieu de mon repos ? Ma main n’a-t-elle pas fait toutes choses[1] ? » Mais je ne le reconnais plus lorsque j’entends Paul dire aux Corinthiens : « Toutefois, nous n’avons qu’un seul Dieu qui est le Père duquel procèdent toutes choses et nous sommes pour lui ; et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par lequel sont toutes choses et nous sommes par lui[2]. »

Quel est encore le Dieu-créateur qui apparaît ici ? Assurément ce n’est plus celui de la Bible, qui, selon la naïve et belle expression du psalmiste « a fait de ses doigts le grand ouvrage des cieux[3]. » Le Christianisme a cru pouvoir affirmer de Dieu, qu’il s’est servi du Verbe hypostasié en la personne de Jésus pour appeler le monde à l’existence et pour le juger. Et certainement, en faisant sienne cette doctrine du Verbe ou Logos si répandu dans la philosophie du temps d’alors, il a eu en vue de complaire à cette philosophie gnostique et de s’en attacher les adeptes et partisans. Mais par cette condescendance, il est devenu infidèle au Judaïsme lequel n’a jamais admis l’intermédiaire d’aucun être entre Dieu et le monde, entre Dieu et les hommes, fût cet être, comme l’appelle Paul, « la splendeur de la gloire, l’image empreinte de la personne de Dieu », ou encore « le Fils premier-né, le plus excellent d’entre les anges, celui auquel tous les autres anges rendent hommage. » La doctrine juive a toujours refusé d’entrer sous ce rapport en compromission avec l’erreur païenne. Ç’a été le faible justement de la religion chrétienne, d’avoir transigé avec ce que répudiait le Judaïsme. Et voilà comment le dogme de la Trinité a pris

  1. Isaïe, chap. LXVI, v. 1 et 2, cité aux Actes des Apôtres, chap. VII, v. 49 et 50.
  2. Épitre aux Corinthiens, chap. VIII, v. 6.
  3. Psaumes, chap. VIII, v. 4.