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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/257

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NOTICE

à-dire les Spartiates, viendraient les attaquer, leur ennemi implacable[1].

Athènes a donc besoin d’être protégée contre Thèbes ? Mais Thésée affirme que les deux cités sont amies. Œdipe lui objecte que rien ne résiste aux années, que le même vent ne souffle pas toujours entre les peuples, et il prévoit que, dans l’innombrable suite des jours et des nuits, un temps viendra où les deux cités lutteront l’une contre l’autre : c’est alors que son froid cadavre, dit-il, boira le sang chaud des envahisseurs[2]. L’allusion à des faits historiques semble évidente, mais quels sont ces faits ? On les a placés en 506, en 431, à une autre date[3]. Comme nous n’avons ici aucun témoignage ancien, aucune scholie, il est impossible d’arriver à une certitude quelconque.

Athènes accueille Œdipe : c’est le moment de louer ce pays hospitalier et de le décrire à celui dont les yeux sont éteints. De la même manière, quand Médée s’est assuré un asile dans l’Athènes du roi Egée, le chœur célèbre devant elle les Érechthéides et l’air transparent et pur qu’ils respirent[4]. L’imitation de Sophocle est aussi sûre que sa supériorité est éclatante. Il n’y a pas chez les poètes grecs de vers plus célèbres[5].

Cela ne dispense pas les modernes, toujours poussés par un besoin ardent de vérité précise, de constater combien les anciens, en face de la réalité, sentaient autrement que

  1. Héraclides, 1030 sqq. La pièce a été jouée vraisemblablement dans les premières années de la guerre du Péloponnèse. Cf. Wilamowitz, Analecta Euripidea, p. 151 sq.
  2. Œd. à Col. 621 sq.
  3. Cf. C. Robert, Oidipus, I, p. 33 sqq.
  4. Médée, 824-845.
  5. Antigone elle-même, v. 720, en fait remarquer adroitement la beauté au public. Cet artifice de Sophocle est, je crois, unique dans son théâtre. — Il reste que ces vers si lumineux ont été écrits par un homme presque centenaire. J’avoue ne pas comprendre très nettement la chose. Il est vrai que nous ne savons pas comment travaillaient les écrivains de l’antiquité, ni si ce stasimon est bien de l’extrême vieillesse de Sophocle. En tout cas, il ne se rattache à l’action que par deux seuls mots : ξένε… ἵκου…