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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/258

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NOTICE

nous les choses. Sans doute, nous ne pouvons plus savoir si à Colone, au ve siècle{, les rossignols étaient aussi sonores, la rosée aussi abondante, les narcisses aussi frais que Sophocle le dit. Toutefois il est sûr que les dieux et les déesses qui apparaissent à la fin de chacune de ses strophes, n’y étaient point. Doit-on de l’absence des uns conclure à l’absence des autres ? Mais depuis quand les poètes sont-ils obligés d’avoir les yeux du vulgaire ? Sans compter qu’il serait très injuste, parce que les vers sont magnifiques et que l’endroit que décrit l’artiste n’est plus guère aujourd’hui[1] qu’un amas de pierres poudreuses, de le rendre responsable de notre déception.

Il mélangea dessein le présent d’Athènes avec son passé, le souvenir glorieux des guerres médiques avec l’activité que déploie sur la mer frémissante son peuple de marins. L’œuvre est celle d’un homme qui décrit ce qu’il a sous les yeux, en même temps que ce qu’il rêve : hymne à la fois religieux et mystique, qui ne perd pas contact avec le réel, puisqu’à côté de la pâleur des oliviers, on voit la couleur blanche du sol, la transparence des eaux qui l’arrosent, le sourire des fleurs. Et tout cela est rempli de dieux, de déesses, de chevaux qui se cabrent sous le mors, de chœurs qui chantent. On pense, en lisant ces vers, aux tableaux de la Renaissance italienne où, sur un fond de verdoyant paysage, se profilent dans la lumière une multitude d’êtres surnaturels.

Le stasimon est à peine terminé que Créon arrive, suivi plus tard par Polynice, c’est-à-dire que la venue de ces deux personnages est une conséquence immédiate de l’hospitalité qu’Athènes accorde à Œdipe : l’un veut s’assurer de sa personne, puisque le salut de Thèbes y est attaché, l’autre vient le supplier de le seconder dans la lutte qu’il engage contre son frère.

Pourquoi les Thébains ont-ils délégué auprès d’Œdipe

  1. Voir dans G. Fougères, Athènes, p. 184 la reproduction bien connue de la butte de Colone.