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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/108

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Œdipe peu de jours à peine avait joui ;
Que pour lui, loin du port toute espérance a fui[1]
Dans l’abîme il tomba, précipité du faîte[2]
De la grandeur
Et du bonheur !
Après avoir délivré la patrie
De ce monstre cruel,
Dont chacun craignait la furie
Et le fléau mortel,
De Thèbes par toi si chérie
Œdipe tu fus roi !
On enviait ta couronne puissante,
Ta fortune brillante ;
Et maintenant sur toi
S’attache de cent maux la rage dévorante !

  1. Le même port immense a suffi pour (tomber) échouer, dit le texte. La même métaphore s’est trouvée dans la bouche de Tirésias, v. 420 : Mais quel port (rivage) quel Cithéron ne sera pas bientôt retentissant, lorsque tu auras connu vers quel hyménée inhospitalier tu as abordé dans ces demeures, ayant obtenu une heureuse traversée, c’est-à-dire quel rivage, quel antre du Cithéron ne répondra pas à tes cris douloureux, quand tu connaîtras cet orageux hyménée, où tu avais cru trouver un port tranquille ?
  2. Après avoir eu la gloire (littér.), s’être trouvé au faîte des honneurs, déchoir, tomber dans l’abîme. Ces paroles du chœur contiennent toute la moralité, non seulement de l’Œdipe, mais de toutes les tragédies de Sophocle. Voilà les vérités utiles et intéressantes qu’on remportait de ces grands spectacles, qui,par l’attrait du plaisir, conduisaient à des émotions profondes et ramenaient naturellement l’homme à des réflexions importantes sur l’inconstance de la fortune et sur la frivolité tous les biens terrestres !