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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/110

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SOMMAIRE DE L’ACTE V.

Œdipe tout sanglant fait parler ses douleurs.
BOILEAU.

Ce dernier acte contient le châtiment que s’inflige Œdipe, la mort de Jocaste qui s’est pendue, et les adieux que vient faire à ses enfants ce père infortuné, qui s’est condamné à la cécité et à l’exil.

Il s’ouvre par le récit, que vient faire un officier de la cour, de ce qui s’est passé récemment dans le palais. Jocaste, dans son désespoir, s’est donné la mort ; Œdipe s’est crevé les yeux. On entend aux portes du palais les cris de fureur et les gémissements, les hurlements même de l’infortuné monarque. Il paraît : ô spectacle déchirant ! son visage ensanglanté frappe d’horreur et d’épouvante le chœur qui détourne ses regards et déplore cette catastrophe. Œdipe, après avoir gémi sur ses destins exécrables, demande aux vieillards qu’ils le précipitent dans la mer. Créon, dans sa pitié généreuse, veut faire rentrer Œdipe dans le palais pour que le peuple n’ait plus sous les yeux le spectacle de ses maux affreux. Avant de quitter cette terre, théâtre de ses grandeurs et de son infortune, il désire embrasser ses filles. Créon a prévenu ses vœux ; elles sont auprès de lui ; il les serre dans ses bras et leur adresse des adieux on ne peut plus touchants. Créon, attendant que l’oracle s’explique une seconde fois, avant de laisser partir Œdipe, le ramène en son palais.

Voltaire a prétendu qu’il y a deux ou trois cents vers inutiles dans ce dernier acte. Qui croirait qu’il va jusqu’à le trouver entièrement hors-d’œuvre ? Il soutient, avec quelque apparence de raison, que la pièce est finie, quand le destin d’Œdipe est déclaré, après l’éclaircissement de Phorbas et du Corinthien. Cela peut être vrai pour nous, mais il n’en était pas de même chez les Grecs. C’est ici ou jamais qu’il faut tenir compte de la différence notable des temps, des lieux, des mœurs, des usages, etc. La scène du père et de ses enfants ne peut être lue sans attendrissement, sans faire même couler quelques larmes.

Ne faut-il pas pour que les destins d’Œdipe s’accomplissent, qu’on le voie partir pour l’exil, qui est le châtiment auquel les Dieux l’ont condamné ? Ses adieux, son départ, ne font-ils pas dès lors une partie essentielle de ses malheurs, sur lesquels roule toute la pièce de Sophocle ?

Après tant d’horreurs et d’atrocités, on éprouve volontiers un attendrissement dont on sentait le besoin. Quand ce malheureux père, ce monarque si infortuné, aveugle, banni, embrasse pour la dernière fois ses enfants, la nature se reconnaît dans ce tableau et fait verser des pleurs sur ses disgrâces, en même temps que sur ce retour si touchant de tendresse.

On voit, à la seule lecture de nos différents sommaires, que l’action est :

Unique ; elle roule tout entière sur le châtiment d’un coupable con-