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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/61

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ment se mêle à l’intrigue avec tant d’art, que ce qui noue celle-ci la dénoue en même temps pour la renouer encore par un double effet tout opposé. Œdipe passe éternellement de la crainte à l’espérance. Quels grands et heureux mouvements dramatiques animent ces scènes du plus haut et du plus vif intérêt !

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ACTE III.


Scène PREMIÈRE.

CRÉON, le chœur.
CRÉON.
O citoyens de Thèbe ! Œdipe votre roi

M’accuse et fait peser sa colère sur moi.
Je ne puis le souffrir et la honte m’accable ;
J’ignore les motifs de sa haine implacable ;
Ma conduite, mes vœux, mes projets, mes discours,
De sa vie ont-ils pu jamais flétrir le cours ?
Devant de tels affronts plutôt que de me taire,
Puissé-je sous mes pas voir s’entr’ouvrir la terre !
Ses reproches sanglants me rendent à vos yeux,
À ceux de mes amis, traître, infâme, odieux.

LE CHŒUR.
La colère sans doute a lancé cet outrage

Et non la vérité.

CRÉON.
Pour qu’il tint ce langage,

J’aurais, suivant le roi, suborné le devin.

LE CHŒUR.
Il l’a dit, mais son but ? j’y réfléchis en vain.


CRÉON.
Et lorsqu’il m’imputait cette action horrible,

Le faisait-il d’un air, d’un visage paisible ?