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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/60

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SOMMAIRE DU IIIe ACTE.

Créon vient pour se justifier des reproches injurieux d’Œdipe et se plaint au peuple. Les deux princes se disputent vivement. Jocaste, pour apaiser cette querelle, sort de son palais et paraît pour la première fois. Pour bannir plus sûrement les inquiétudes que le devin a fait naître dans l’esprit d’Œdipe, elle lui dit qu’il ne faut ajouter foi ni à Tirésias, ni à Apollon lui-mêéme. Un oracle, ajoute-t-elle, lui avait prédit que Laïus serait tué par son fils. Eh bien, ce fils a péri aussitôt après sa naissance, et Laïus a été assassiné par des brigands, en un endroit où le chemin se partage en trois routes. Cette circonstance du lieu augmente l’anxiété à laquelle Œdipe est en proie. Il veut savoir où, comment, et quand a été commis le meurtre, et il se rappelle qu’en un lieu semblable il a frappé mortellement quelqu’un qui lui disputait les honneurs du pas. Une seule raison l’empêche encore de se croire coupable, c’est que, dit-on, plusieurs personnes ont tué Laïus. Or, lui Œdipe n’était point accompagné, quand il a fait périr un inconnu. Il demande s’il y a des témoins de la mort de ce roi. Jocaste répond qu’un seul existe, qu’il est actuellement aux champs, où il a soin des troupeaux. Œdipe ordonne qu’on le fasse venir, pour éclaircir une affaire aussi importante. Cependant il apprend à Jocaste, qu’étant à Corinthe, chez le roi Polybe, on lui reprocha de n’être point le fils de ce monarque. N’ayant pu le savoir du roi, il eut recours à l’oracle de Delphes qui lui apprit qu’il ferait périr son père et épouserait sa mère. Pour éviter ces horreurs, il s’enfuit à jamais de Corinthe. Tandis qu’il faisait route vers Thèbes, il rencontra un homme de l’air et de l’extérieur attribués à Laïus. Il ajoute, qu’après une dispute, cet homme a été tué par lui seul, et que si Laïus a eu plusieurs meurtriers, il doit se croire innocent. Un grand mouvement s’opère ici dans les esprits : le sort du prince dépend en effet du témoignage d’un seul homme. Ces paroles d’Œdipe et de Jocaste, qui composent l’admirable scène dite de la double confidence, doivent exciter dans le spectateur l’émotion la plus vive. Tous les indices du meurtre de Laïus sont conformes : temps, lieu, ressemblance de personnes. Il ne reste qu’un léger doute : le meurtrier était-il seul ou non ? Jusqu’à ce que cette question s’éclaircisse, les esprits restent inquiets et en suspens. Ajoutez à cela qu’Œdipe ne connaît point ses vrais parents, et que les siens ne le connaissent point. Déjà, comme on voit, les réponses de l’oracle touchent a leur accomplissement et les esprits sont pénétrés d’horreur à la vue du sort qui attend Œdipe et de sa situation terrible.

On doit surtout remarquer, dans cet acte la finesse de ressort qu’il y a dans la manière dont Jocaste apaise Œdipe. Son discours produit un effet tout contraire. Œdipe frémit, se rappelle avoir tué un vieillard dans les mêmes conjectures, il se soupçonne le meurtrier. C’est ainsi que le dénoû-