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Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/341

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peines réservées aux impies ? Eh bien ! si le sort qu’on me fait est approuvé des dieux, je reconnais que je souffre par ma faute ; mais si le tort est à mes persécuteurs, je ne leur souhaite pas plus de maux que ne m’en cause leur injustice !

LE CHOEUR.

Les mêmes orages des mêmes passions agitent encore son âme[1].

CRÉON.

Aussi, ferai-je repentir de ces lenteurs ceux qui tardent à l’emmener.

ANTIGONE.

Hélas ! cette parole m’annonce ma mort prochaine.

CRÉON.

Ne te flatte pas que rien puisse arrêter l’accomplissement de mes ordres.

ANTIGONE.

O ville de Thèbes, ma patrie ! dieux de ma famille[2] ! c’en est donc fait, on m’entraîne. Chefs thébains, voyez la seule[3] fille qui reste de vos rois, voyez à quel supplice et par quels juges je suis condamnée, pour être restée fidèle au culte de la piété.

(On emmène Antigone.)


LE CHOEUR.

(Strophe 1.) Danaé aussi eut la douleur d’échanger la lumière céleste pour les ténèbres d’une prison d’airain[4] ; cachée à tous les yeux, elle resta enchaînée dans ce triste tombeau ; et cependant, ô ma fille, ma fille, sa naissance était illustre, et elle recéla dans son sein la pluie d’or de Jupiter. Mais le Destin est une puissance redoutable ; ni

  1. Littéralement : « Les mêmes souffles des mêmes vents possèdent encore son âme. »
  2. Les dieux de sa famille étaient Mars et Vénus, père et mère d’Harmonie, épouse de Cadmus ; puis Sémélé, Zéthos et Amphion.
  3. Elle juge Ismène indigne d’être nommée.
  4. Pausanias, 1. II, c. 23, 7, dit qu’il vit encore à Argos les fondements en pierre de cette maison d’airain, que Périlaos avait détruite pendant sa tyrannie.