poésie issue de Mürger… Le groupement parnassien ne s’est fait sur aucune théorie, aucune esthétique[1] ». Ce disant, Mendès nie ce qui est ; puis, mis en train, il affirme ce qui n’est pas, à propos du premier Parnasse : « l’éditeur, dans un avant-propos que j’avais rédigé, disait : Le « Parnasse » sera à la poésie ce que le Salon est à la peinture[2] ». Or, il n’y a pas d’avant-propos au Parnasse de 1866.
Le bluff réussit souvent. L’anecdote Glatigny fait son chemin ; quarante ans après La Légende du Parnasse, nous la voyons reparaître, agrémentée[3]. Et pourtant Brunetière avait pris soin de démentir le propos, en vérifiant les dates : faire commencer le Parnasse en 1861, c’était frustrer de leur part légitime ceux dont Mendès et Glatigny n’étaient que les continuateurs bruyants[4]. Avant 1860, alors que Mendès était encore un petit Bordelais inconnu, et Glatigny un cabotin errant, Banville avait déjà publié Les Cariatides, Les Stalactites, Les Odes funambulesques ; Leconte de Lisle, ses Poèmes antiques, et une quarantaine de pièces détachées qui formeront largement la moitié des Poèmes barbares[5]. Mais qu’importait à Mendès ? Voulant se faire passer pour le fondateur du Parnasse, il associait à sa gloire Glatigny, qu’il ne considérait pas comme un rival dangereux ; il voulait même le faire passer pour le parrain des Impassibles ; il prétendait que ce nom, ce sobriquet, avait été donné aux Parnassiens à cause d’une pièce de Glatigny, intitulée L’Impassible. M. Scheffer a démontré que c’était là une erreur matérielle[6].
Mendès est un si étrange historien que son confrère, Xavier de Ricard, éclairé par la jalousie, s’en est aperçu, et a protesté : « Mendès a une très lyrique conception des droits souverains du poète sur la réalité, et, pour bien avertir qu’il a voulu rester poète en parlant du Parnasse, il a intitulé son recueil non pas histoire, mais légende[7] ». Ricard, qui est moins bon poète que Mendès, est meilleur historien. Il est beaucoup plus modeste, dans ses intentions ; il nous prie, au début de sa série d’articles dans Le Petit Temps, de ne pas oublier qu’il n’écrit pas l’histoire du Parnasse, qu’il apporte