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LA PERSISTANCE DU PARNASSE

pour n’user de mon nom que dans le cas où vos idées seraient identiques aux miennes[1] ».

L’affaire n’eut pas de suite, et ne pouvait en avoir : le Parnasse ne pouvait pas se fondre avec le Symbolisme ; il avait encore assez de force d’attraction pour attirer à lui la sympathie de poètes comme Achille Paysant, Louis Le Cardonnel, Haraucourt, Ephraïm Mikhaël, Émile Despax, André Dumas, Armand Godoy, surtout Jean Segrestaa avec son Amphore[2].

Hors de France, sa renommée n’a pas fléchi[3]. La gloire posthume de Leconte de Lisle continue à dorer la cime du Parnasse. Au Canada, l’auteur des Poèmes est toujours placé au premier rang de nos écrivains[4]. Aux États-Unis, on le considère comme le plus parfait poète que la France, que le monde entier, aient connu[5].

Le Parnasse se survit dans les œuvres de ses grands représentants ; il vit encore dans la personne de Frédéric Plessis, sans oublier celui qui fut l’élève de l’auteur de La Lampe d’Argile. En recevant M. Pierre de Nolhac à l’Académie, Maurice Donnay lui rappelait que jadis, préparant sa licence à Clermont-Ferrand, il y avait été initié par F. Plessis à la technique parnassienne, et qu’il était toujours resté fidèle à cette forme d’art[6]. Ainsi le Parnasse a atteint ses soixante-quinze ans, autant que le Romantisme ; pour ses noces de diamant avec la poésie il nous offre cette œuvre pure :


Je sais, sous l’Acropole, un vieux potier d’argile
Qui finit sa journée en lisant l’Évangile.
Le soir tombe : ses doigts ont longtemps travaillé ;
Il a songé beaucoup, et quelquefois prié ;
Mais, s’asseyant au seuil de son humble boutique,
Il reçoit dans ses yeux tout l’azur de l’Attique,
Et l’invincible appel lui fait toujours chercher
Les beaux marbres divins épars sur le rocher.
Sois-lui clément, Seigneur[7]



  1. P. p. Frédéric Lachèvre dans le Mercure de France du Ier juin 1928, p. 291.
  2. E. Prévost, La Vie Catholique, 15 décembre 1927, p. 5 ; Revue des Poètes, 15 décembre 1927 ; Maurice Ricord, Le Figaro du 29 décembre 1928 ; J. Tellier, Nos Poètes, p. 133, 141-143 ; Louis Thomas, Nouvelles littéraires du 18 février 1928 ; Id., ibid., 3 mars 1928 A. Praviel, Correspondant du 10 juillet 1927, p. 46 ; Francis Jammes, Mémoires, II, 48-50.
  3. En Belgique, terre d’élection du Symbolisme, ne pourrait-on lui rattacher Albert Giraud avec son Hors du Siècle ? Cf. Mercure de France, Ier mars 1929, p. 483.
  4. Berthelot-Brunet, Vingt-cinq ans de Littérature Française, II, 129.
  5. Cf. Irving Brown, Leconte de Lisle, A Study of the man and his Poetry (thèse de Columbia University, New-York, 1924), p. 1 et 116.
  6. Officiel du 19 janvier 1923, p. 588 ; cf. Louis Thomas, Les Nouvelles littéraires du 17 décembre 1927.
  7. P. de Nolhac, R. D. D.-M., Ier juin 1928. Cf. L. de Mondadon, Études du
    20 août 1929, p. 480.