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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/297

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sophie kovalewsky.

ces histoires m’aient complètement ôté le désir de m’amuser. Je suis plutôt disposée à m’établir n’importe où pour pouvoir travailler en paix. Je sens un grand besoin d’occupation, mathématique ou littéraire, n’importe, pourvu que je puisse m’absorber dans mon travail et m’oublier moi-même, ainsi que l’humanité tout entière. Si tu éprouvais le même désir de me rejoindre, que j’aurais de plaisir à te retrouver, je serais heureuse de venir partout où tu voudrais. Mais si, comme il est probable, tu as déjà disposé de ton été, je resterais bien encore quelques semaines ici, pour m’en retourner ensuite avec Foufi à Stockholm, où je m’établirais quelque part dans l’archipel pour travailler de toutes mes forces. Je ne veux plus faire un pas pour arranger quelque chose d’amusant. Tu sais à quel point je suis fataliste, et je crois avoir lu dans les étoiles que je ne puis rien me promettre de bon cet été. Il vaut mieux en prendre son parti, et ne pas faire d’inutiles efforts. — J’ai écrit hier le commencement de Væ Victis. — Vraisemblablement je ne l’achèverai jamais. Peut-être ce que j’ai écrit pourra-t-il te servir un jour parmi tes matériaux. Pour faire des mathématiques il faut être plus installée que je ne le suis ici pour le moment. »

Et dans une des lettres suivantes, écrite d’une des petites îles de l’archipel où elle s’était établie, elle dit :

« J’ai eu beaucoup de plaisir dans les derniers temps en Russie, et j’ai même fait quelques connaissances intéressantes. Mais un vieux mathématicien,