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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/299

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sophie kovalewsky.

Elle m’écrivit le même été une lettre amusante, que je citerai pour donner un échantillon de la tournure humoristique de son esprit. Comme elle ne se distinguait pas précisément par un ordre remarquable dans ses papiers et ses affaires, je lui recommandais, en lui envoyant quelque lettre confidentielle, d’être prudente, et de ne pas la laisser traîner. Elle m’écrit à ce sujet :


« Pauvre Anne-Charlotte ! Il me semble que la crainte de voir tomber tes lettres entre des mains indignes tourne presque à la maladie chronique. Les symptômes en deviennent chaque jour plus alarmants, et je commence à m’inquiéter sérieusement de toi. Il me semble cependant qu’une personne qui possède une écriture aussi illisible que la tienne, pourrait à cet égard éprouver une certaine tranquillité. Je t’assure que sauf les personnes directement intéressées à la question, il y en a peu qui auraient la patience de déchiffrer tes pattes de mouches. Pour ce qui est de ta dernière lettre, elle a naturellement été perdue à la poste ; quand je l’ai enfin retrouvée, l’enveloppe couverte des cachets du cabinet noir, je me suis empressée de la laisser ouverte sur ma table, pour être examinée par mes bonnes et par toute la famille G. Ils ont tous été d’avis que la lettre était très bien écrite et contenait des choses intéressantes. Aujourd’hui j’ai l’intention de faire une visite au professeur Montan pour lui parler de traductions polonaises. Je prendrai ta lettre et tâcherai de l’égarer