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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/97

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sophie kovalewsky.

je me disposais à me rendre avec lui dans le petit coin consacré à nos entretiens, lorsque j’aperçus Olga, la perfide, qui prenait la même direction.

Mes recommandations avaient, je crois, tout gâté. Si je n’avais rien dit, il est fort probable qu’en nous voyant entamer une conversation sérieuse, elle se serait vite enfuie, car elle avait horreur de tout ce qui ressemblait à une leçon ; mais, en remarquant combien je désirais me débarrasser d’elle, et combien j’attachais de prix aux récits de mon oncle, elle s’imagina qu’ils étaient très amusants, et voulut en avoir sa part.

« Puis-je aussi venir avec vous ? demanda-t-elle d’un ton suppliant, en levant vers mon oncle ses yeux bleus attendris.

— Certainement, ma petite chérie », répondit mon oncle, en la regardant amicalement, évidemment charmé de sa mignonne figure rose.

Moi aussi, je regardai Olga, d’un air furieux, qui du reste ne la troubla aucunement.

« Mais Olga ne sait rien, et ne nous comprendra pas », essayai-je de faire remarquer à mon oncle d’une voix irritée.

Cette tentative pour me délivrer de mon importune compagne fut également vaine.

« Eh bien, nous parlerons aujourd’hui de choses plus simples, afin qu’elles puissent aussi intéresser Olga », dit l’oncle avec bonté.

Et, nous prenant toutes deux par la main, il se dirigea vers le divan avec nous.