Aller au contenu

Page:Spenlé - Novalis.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
100
NOVALIS

le pouvoir de sortir de lui-même, d’être avec conscience au delà des sens soit refusé à l’homme. L’homme est capable à chaque instant d’être une essence supra-sensuelle. Autrement il ne serait pas un citoyen de l’univers, il serait un animal. Sans doute la réflexion calme, le recueillement sont difficiles dans cet état, puisqu’il est si continuellement, si nécessairement mêlé au cours changeant de nos autres états. Mais plus nous réussissons à en prendre conscience, plus devient vivace, puissante, persuasive la croyance qu’il engendre, la foi aux révélations authentiques de l’Esprit. Ce n’est ni un « voir » ni un « entendre », ni un « sentir » ; c’est composé des trois à la foisc’est plus que les trois réunis. — une impression de certitude immédiate, un aperçu de ma vie la plus vraie, la plus intime. Les pensées se changent en commandements, les désirs se transforment en réalités. Pour l’esprit faible, les constatations faites en de pareils instants deviennent des articles de foi. » Il note ensuite quelques-unes des causes, généralement fortuites, qui provoquent ces expériences. « Le phénomène devient frappant surtout à la vue de certaines personnes, de certains visages humains, — particulièrement à la vue de certains yeux, de certaines expressions de physionomie, de certains mouvements ; — à l’audition de certaines paroles, à la lecture de certains passages ; — lorsque se découvrent certaines échappées sur la vie, le monde, la destinée. Beaucoup de causes fortuites, des phénomènes de la nature, des heures particulières du jour, des saisons, nous procurent de pareilles expériences. Il est des dispositions morales particulièrement propices à ces révélations. La plupart sont instantanées. — quelques-unes passent plus lentement, — très peu sont durables. »[1]

  1. N. S. II, 1. p. 6. — Novalis reproche à Fichte de n’avoir pas mis l’extase à la base de son système. « Fichte ne comprend pas l’hypostase, et il lui manque toute une moitié de l’activité spirituelle créatrice. Sans extase — sans une conscience fascinatrice, qui nous tient lieu de tout, — c’est peu de chose que la philosophie » (N. S. II, 1. p. 199). Comp. N. S.II, 1, p 178. « L’état de maison (sic) est extatique » etc.