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Page:Spenlé - Novalis.djvu/155

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L’INTUITIONNISME

chéance. « Celui qui cherche, doute. Mais le génie affirme avec tant d’assurance et d’audace ce qui se produit en lui, parce qu’il n’est pas emprisonné dans la représentation, ni elle en lui, mais parce qu’ici la contemplation et l’objet contemplé s’accordent spontanément et paraissent collaborer librement à une même œuvre… La poésie est le Réel absolu, c’est là le noyau de ma philosophie ; plus il y a de poésie, plus il y a de vérité. »[1]

LA PSYCHOLOGIE ROMANTIQUE DU GÉNIE


On avait cru d’abord que Fichte lui-même fournirait une théorie métaphysique de l’imagination productrice, ce que Novalis appelait une « Esthétique » ou encore une « Fantastique transcendantale ». Elle semblait découler si nécessairement des prémisses de son système. Mais il s’était borné dans la Doctrine de la Science à esquisser une « Logique transcendantale » et après une envolée spéculative grandiose il retombait de plus en plus dans les platitudes du doctrinarisme moral et de la philosophie sociale. Force fut donc aux romantiques de « fichtiser » mieux que Fichte.

« De l’imagination productrice doivent être déduites toutes les facultés, toutes les activités du monde intérieur et du monde extérieur ».[2] Et d’abord il s’agissait d’établir que même dans la vie ordinaire se manifeste cette imagination productrice, comme une sorte de génialité élémentaire et inconsciente, sans laquelle, disait Novalis, « nous n’existerions même pas ». Voici par exemple un fait bien connu, qui déjà nous en présente l’ébauche et souvent la caricature grossière : le rêve. Il y a dans notre vie comme une seconde vie, au retour périodique. Alors se baisse le rideau sur la réalité environnante et un artiste caché, un ar-

  1. N. S. II, 1, p. 5 et p. 7.
  2. N. S. II, 2, p. 565.