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Page:Spenlé - Novalis.djvu/302

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NOVALIS

Ainsi s’éclaire le sens « ésotérique » du catholicisme de Novalis. C’est la philosophie de la nature, régénérée par l’idéalisme allemand, qui donnera à la foi nouvelle sa substance intime et résistante ; le catholicisme lui fournira sa conception politique, monarchique et théocratique, son rêve d’universelle et d’indissoluble communion religieuse. Par une sorte de Franc-Maçonnerie, invisible d’abord, s’opérera l’alliance entre tous les esprits, orientés vers le même idéal, — philosophes, théologiens, physiciens, artistes. Déjà Schleiermacher, dans ses « Discours sur la religion », prophétisait cette alliance nouvelle entre la religion et les arts. De leur côté les physiciens romantiques tels que Ritter, Baader, plus tard Schubert et Schelling lui-même se mettaient à l’école des théosophes et des mystiques. « Dans la dernière moitié du siècle », ainsi Novalis résumait les symptômes qu’il croyait observer dans le mouvement général des esprits, « une conflagration nouvelle, plus violente s’est produite partout ; les éléments ennemis se sont entrechoqués, avec plus de véhémence que jamais ; des explosions formidables ont éclaté. À présent quelques-uns prétendent qu’en un point il s’est produit déjà une véritable pénétration, qu’un germe de synthèse a paru, qui, par un développement continu. s’assimilera peu à peu toute la masse et lui prêtera une forme organique indissoluble. Ce principe de paix éternelle. disent-ils, est doué d’une force d’expansion infinie et irrésistible, et bientôt il y aura de nouveau une seule Science, un seul Esprit, comme un seul Prophète et un seul Dieu. »[1]

On se rappelle les prédictions, rapportées par Herder dans son « Adrastea », sur la physique et la religion nouvelles, et les railleries de Schelling, dans sa Profession de foi épicurienne. À son tour Frédéric Scldegel sonnait le tocsin dans le moniteur officiel du romantisme et embouchait la trompette apocalyptique. « Les temps nouveaux s’annoncent comme une époque aux pieds légers, aux sandales ai-

  1. N. S. II, 1, p. 59-60.