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Page:Spenlé - Novalis.djvu/412

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

trouvaient un certain nombre de convertis romantiques, Frédéric Schlegel, Adam Müller, Haller, etc. La conversion de ce dernier avait particulièrement fait scandale. On s’aperçut bien alors que cette accusation de « catholicisme secret », dont avaient si souvent joué les « Aufkkerer » du 18me siècle, n’était pas une pure légende, puisque Haller, quoique secrètement converti au catholicisme, n’en continuait pas moins à exercer ses fonctions de membre du conseil fédéral de Berne et avait même obtenu de l’évêque de Fribourg l’autorisation de prêter le serment constitutionnel, par où il s’engageait solennellement dans ses nouvelles fonctions à protéger l’Église protestante. Lorsque le secret de sa conversion fut éventé, il avoua lui-même qu’il avait gardé le silence, afin que son apologie de la théocratie parût avoir été écrite de la plume d’un protestant et produisit ainsi une impression plus profonde. Les armes dont se servaient les nouveaux convertis n’étaient pas toujours très loyales, comme on voit.

On s’explique ainsi l’intérêt que trouvait Frédéric Schlegel à publier l’« Europa » de son ami, — surtout que, par une « pieuse fraude », qui rappelle un peu les procédés de Haller, il avait eu soin de retrancher dans la conclusion ce qui semblait nettement hostile au catholicisme moderne. Précisément quelques années auparavant, en 1819, avait paru dans le « Sophronizon » la fameuse diatribe de Voss contre le « converti » Stolberg. La polémique s’était continuée encore longtemps après la mort de ce dernier, en une série de pamphlets, d’attaques et de ripostes. Très habilement, dans ses conférences faites à Vienne en 1812 sur la littérature ancienne et moderne, Frédéric Schlegel avait rapproché les deux noms de Stolberg et de Novalis, en qui il saluait les annonciateurs d’une Allemagne nouvelle. Des relations très intimes s’étaient nouées entre les deux familles Stolberg et Hardenberg et le frère du poète, Karl von Hardenberg, après une conversion soudaine au catholicisme, avait épousé une des filles de Léopold von Stolberg. Il possé-