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Page:Spenlé - Novalis.djvu/436

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

rations d’au-delà, qui le portaient vers le symbole et la fleur bleue… sa manière de composer, sans rien de plastique, mais riche en émotion, avec de grandes et étranges synthèses d’idées et de vocables, sa prédilection pour le fragment, pour l’aphorisme, tout cela a séduit une génération, qui, fatiguée du réalisme, mais incapable de créer une forme véritable, est allée elle aussi vers le symbole pour exprimer le monde confus de ses rêves et de ses sentiments et qui en Nietzsche, son éducateur, a retrouvé un mélange de Hœlderlin et de Novalis. Mais cette jeunesse n’était pas assez robuste pour recueillir l’image totale de la personnalité d’un Hardenberg, ni pour enfanter à nouveau le monde qu’il portait en lui. Elle s’est attachée surtout à ce qu’il y avait chez lui de maladif, à ses tendances occultistes, nous dirons même à sa luxure mystique, — car, il faut bien le reconnaître, c’était là un élément où vivait sa pensée, mais non le seul, ni l’essentiel… » (op. cit. p. 201).

Ces lignes font allusion à de nouvelles aspirations littéraires, qui se sont donné carrière dans les dix dernières années du 19me siècle, un peu partout en Europe, et qui, sous le nom de symbolisme ont amené une renaissance partielle du premier romantisme allemand. « Avant toutes choses, le symbolisme fut la réaction contre le naturalisme, qui avait fait la part trop petite à l’« âme » et qui avait voulu tuer le lyrisme. On l’a défini plus tard un « néo-romantisme », et en effet il procède de quelques auteurs parmi les premiers romantiques, tels que Novalis, — avec cette différence toutefois que le premier romantisme a été un produit sain de l’âme populaire, tandis que le symbolisme, né d’une culture artificielle et excessive, est resté purement esthétique » (Bartels, op. cit., p. 685). Les mêmes symptômes étaient observés par le critique libéral, M. Jentsch, dans un article sur « l’ancien et le nouveau romantisme », paru en 1901 dans les « Grenzboten » (1901, I, p. 561 ss). Déjà quelques années auparavant l’auteur avait signalé de nombreuses analogies entre le nouveau « prophète » Nietzsche et l’ancien