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Page:Spenlé - Novalis.djvu/479

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LES PROBLÈMES

Ce jugement-type, avec des variations de détail, a été reproduit souvent dans la suite. On a déjà vu que la « Nachlese » reconnaissait dans les Hymnes à la Nuit le récit d’une conversion réelle et prétendait découvrir dans cette attitude religieuse et sincèrement croyante du poète à l’endroit du christianisme le secret de son originalité, par où il se séparait de ses amis romantiques. Il restait bien un point obscur à élucider. Pourquoi le père de Novalis — chrétien sincère lui aussi, — ne voulut-il jamais rendre justice à la piété de son fils et ne voyait-il en ce dernier qu’un rêveur dévoyé ? C’est que les manifestations extérieures de la foi religieuse n’étaient pas les mêmes chez l’un et chez l’autre. « Tandis que chez le père la régénération intérieure se manifesta au dehors sous les espèces du méthodisme et du piétisme morave, cette régénération resta chez le fils tout intérieure et ne s’exprima que par la poésie. » (Nachlese, op. cit. p. 144). Mais, si on l’examine de près, cette dernière phrase ne donnerait-elle pas à entendre que la vie religieuse opéra chez l’un une transformation profonde et radicale, tandis que chez l’autre elle ne pénétra guère dans les parties actives du caractère et se réduisit à une attitude esthétique et imaginative plutôt que morale ?

M. Schubart force encore la note. La pensée qui inspire toute son étude, avons-nous vu, c’est que seul parmi les romantiques Novalis est arrivé à une conception positive et sincère du christianisme et qu’à cet égard il est toujours resté un isolé et un méconnu parmi ses compagnons littéraires. On a prétendu parfois que la lecture des Discours sur la Religion de Schleiermacher avait inspiré au poète ses Hymnes spirituelles. M. Schubart n’a pas de peine à prouver que cela est chronologiquement impossible, attendu que Novalis avait déjà composé une partie de ses cantiques, lorsqu’on septembre 1799 il lut pour la première fois l’œuvre de l’éloquent théologien berlinois. Il y a plus. Esquissant un parallèle entre les pensées religieuses de ces deux esprits, l’auteur prétend découvrir chez Novalis une concep-