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Page:Spenlé - Novalis.djvu/486

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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE

losophique la mieux appropriée se trouve dans le « Mærchen ». Il manque absolument à Novalis le don de l’analyse et de l’exposition philosophiques. Sans doute il a pressenti, comme le disait M. Dilthey, les puissances irrationnelles et anonymes de la vie et de la nature. « Mais pour designer cet innommable, pour suivre à la trace ces combinaisons merveilleuses, pour les distinguer avec précision et les décrire méthodiquement, personne n’était moins préparé que Novalis. Le don d’observation exacte, la clairvoyance dialectique d’un Schleiermacher lui manquaient totalement… Sa psychologie est la plus trouble et la plus irréelle qui existe » (ibid. p. 357). Pareillement sa philosophie de la nature n’est qu’un jeu capricieux d’hypothèses, une mixture étrange de sentimentalité rêveuse et d’empirisme scientifique. La nature ne fait que refléter en un dessin bigarré et incohérent les dispositions subjectives du poète. Dans le « Mærchen » d’Hyacinthe et de Petite-Fleur-des-Roses il faut voir ce que Novalis a écrit de plus parfait en ce genre, la quintessence de son génie (ibid. p. 351). — Les mêmes dispositions anarchiques, capricieuses et incohérentes se trouvent au fond de la pensée religieuse de Novalis. Le pamphlet religieux d’« Europa » en est le meilleur exemple. C’est une rêverie fantastique, une illusion poétique que Novalis s’est donnée, après avoir lu les « Discours » de Schleiermacher. « Alors même que sa pensée semble ici se concentrer et s’attacher à un contenu spécifiquement chrétien, rien ne l’empêche de divaguer aussitôt après en des formules plus capricieuses, inventées de toutes pièces… Même dans les Hymnes spirituelles, sous la foi chrétienne qui s’y exprime, on sent toujours un fonds de piété libre de toute croyance positive et en quelque sorte purement naturiste » (ibid. p. 469). Pareillement on chercherait en vain un plan philosophique précis dans le roman d’Henri d’Ofterdingen. Sans doute l’hypothèse de la migration des âmes y apparaît d’une manière intermittente. « Mais sans cesse elle se trouve mêlée à d’autres hypothèses sur l’immorta-