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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/216

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— Si le Mouloungou a fait mon père, le Mouloungou m’a fait aussi ; n’est-ce pas ?

— Parfaitement. Où pensez-vous que soit allé votre père, maintenant qu’il est mort ?

— Les morts sont morts et ne vivent plus, dit-il solennellement. Le chef meurt, et il n’est plus rien ; il ne vaut pas plus qu’un chien qui a cessé de vivre ; il est fini ; ses paroles sont mortes, sa bouche n’a plus de voix. — C’est vrai ! ajouta le Mgogo en me voyant sourire. Le chef mort n’est plus rien. Qui dit le contraire dit un mensonge.

— Mais votre chef n’est-il pas un grand personnage ?

— Seulement pendant sa vie. Quand il est mort, il va dans la fosse comme les autres, et il n’en est plus question, pas plus que d’une autre personne.

— Comment un Mgogo est-il enterré ?

— Ses deux jambes sont réunies et attachées ; le bras droit est mis près du corps, l’autre est plié sous la tête. On place le mort dans la fosse, sur le côté gauche ; on étend sur lui sa choukka, puis on le recouvre de terre, et l’on y plante des broussailles pour empêcher le fizi (la cynhyène) de le déterrer. Les femmes sont mises sur le côté droit, dans des fosses séparées de celles des hommes.

— Et que faites-vous du sultan quand il est mort ?

— Nous l’enterrons comme les autres, cela va sans dire. Seulement la fosse est creusée au milieu du village, et une maison est construite dessus. Le nouveau sultan demande alors un bœuf ; il le tue devant cette maison, en prenant le Mouloungou à témoin qu’il est bien le chef légitime ; ensuite il distribue la viande au nom de son père, et chaque fois qu’un bœuf est tué dans le village, c’est devant le tombeau du chef.

— Quand le sultan est mort, qui est-ce qui lui succède ? Est-ce son fils ?

— Oui, lorsqu’il en a un. S’il n’a pas d’enfant, c’est le chef le plus élevé qui le remplace. A près le mtémi, qui est le chef du district, vient le msagira, dont l’emploi est d’écouter les plaintes de chacun, de les transmettre au mtémi, qui rend la justice et dont il rapporte les arrêts. C’est lui qui reçoit le honga, lui qui le place devant le mtémi ; quand ce dernier a pris ce qui lui convient, le reste est pour le msagira. Celui-ci commande aux manyapara ou simples chefs de bourgade.

— De quelle manière se marient les Vouagogo ?